Des physiciens viennent de mettre à jour une nouvelle classe de solutions à l’équation de Boltzmann. Cette équation modélise l’effet des collisions sur la distribution des vitesses dans un gaz. Leur étude a porté sur un gaz placé dans un piège dont le potentiel dépend du temps. Le résultat a permis de proposer un nouveau protocole pour manipuler un gaz atomique piégé bien plus rapide que les méthodes utilisées jusqu’à présent.
Sous l’effet des collisions, les molécules d’un gaz contenu dans une enceinte se
thermalisent en échangeant quantité de mouvement et énergie ; rapidement,
la densité du gaz s’uniformise dans tout le volume tandis que la distribution de
probabilité des vitesses converge vers une distribution universelle, la statistique
de Maxwell-Boltzmann. Lorsque ces mêmes molécules sont piégées dans un
potentiel harmonique, le résultat final dépend de l’état initial du gaz et n’est pas
nécessairement stationnaire : de manière périodique le nuage de molécules
se contracte en se réchauffant et se dilate en se refroidissant. Inspirés par
ce résultat, des physiciens du Laboratoire Collisions, Agrégats, Réactivité -
LCAR (CNRS / Univ. Toulouse 3) et du Laboratoire de Physique Théorique et
Modèles Statistiques - LPTMS (CNRS / Univ. Paris-Sud) ont collaboré avec des
physiciens espagnols pour analyser le cas des pièges non stationnaires. Ils ont
trouvé un comportement analogue en mettant à jour la classe des solutions
correspondant à toutes les évolutions, périodiques ou non, du potentiel de
piégeage. Ces résultats ont permis aux chercheurs de proposer un nouveau
protocole permettant de transformer l’état d’un gaz piégé bien plus rapidement
que les méthodes couramment utilisées, et cela, quelles que soient les
interactions entre molécules, pourvu qu’elles soient à courte portée. Ce travail
est publié dans la revue Physical Review Letters.
Pour décrire la dynamique d’un gaz dilué dans un potentiel harmonique, les
chercheurs ont travaillé dans le cadre de l’équation de Boltzmann qui décrit
l’évolution de la densité de probabilité dans l’espace des phases positionvitesse
en prenant en compte de manière précise l’effet des collisions entre
molécules. Ils ont montré que les solutions à cette équation prennent la forme
d’une distribution de Maxwell généralisée, c’est-à-dire des distributions
gaussiennes des positions et des vitesses dont les largeurs dépendent du
temps. Connaissant l’évolution de l’état en fonction du potentiel, les physiciens
ont eu l’idée d’ « inverser la question » et de déterminer aussi quel potentiel
choisir pour obtenir l’évolution de l’état que l’on désire, et notamment comment
obtenir un état final cible choisi. L’intérêt de ce travail est que les solutions
analytiques obtenues s’appliquent aussi bien dans la formulation quantique
du problème que pour son pendant classique. Elles donnent la clé qui permet
d’effectuer, en un laps de temps arbitrairement court, une transformation
du gaz d’un état d’équilibre vers un autre, pour un système à N corps en
interaction. En cela, la méthode proposée « court-circuite » les procédures
classiques dites adiabatiques, qui réalisent le même objectif, mais en un
temps très long. Le protocole peut même être arbitrairement rapide et le prix
de l’impatience réside dans les variations rapides du potentiel extérieur, qui
doit devenir transitoirement expulsif plutôt que confinant (voir la figure). Validée
par des simulations numériques inspirées de celles qui sont mises en oeuvre
en aéronautique, la méthode doit maintenant être réalisée expérimentalement.
EN SAVOIR PLUS :
Exact non-equilibrium solutions of the Boltzmann equation under a
time-dependent external force, D. Guéry-Odelin1, J. G. Muga2,3, M.J. Ruiz-
Montero4 et E. Trizac5, Physical Review Letters 112, 180602 (2014)
• Retrouvez la publication sur la base d’archives ouvertes arXiv
CONTACT CHERCHEUR :
Emmanuel Trizac, professeur de l’Université Paris-Sud
INFORMATIONS COMPLEMENTAIRES :
1 Laboratoire Collisions, Agrégats, Réactivité (LCAR)
2 Departamento de Quimica Fisica, Universidad del Pais Vasco, Bilbao,
Spain
3 Department of Physics, Shanghai University, China
4 Fısica Teorica, Universidad de Sevilla, Spain
5 Laboratoire de Physique Théorique et Modèles Statistiques
(LPTMS)