Avec quelle efficacité une molécule d’eau se colle sur un agrégat d’eau ? C’est ce que cherchaient à comprendre les scientifiques du Laboratoire collisions agrégats réactivité. Pour cela ils ont réalisé une expérience originale dont les résultats sont quelque peu inattendus : à basse vitesse d’impact, l’agrégat d’eau se comporte comme un objet « mou » qui absorbe l’énergie de collision, favorisant ainsi le collage, tandis qu’à plus haute vitesse d’impact, il ressemble à un objet « dur », sur lequel rebondit la molécule, empêchant l’adhésion.
Dans une gamme d’énergies de collision suffisamment basses, les mesures effectuées ont montré que la probabilité de collage ne pouvait pas s’interpréter uniquement en termes d’énergie déposée, mais était aussi gouvernée par la durée de la collision. La probabilité de collage de molécules d’eau sur des agrégats d’eau a été mesurée en fonction de la taille de ceux-ci, contrôlée à la molécule près, pour différentes énergies de collisions. Dans les conditions des expériences réalisées, les scientifiques s’attendaient à observer une probabilité de collage sensiblement plus grande que celle donnée par la probabilité géométrique de collision, à cause de l’attraction électrostatique entre la molécule et l’agrégat. Or, toutes les mesures donnent une probabilité plus petite, ce qui signifie que souvent la molécule, bien qu’ayant percuté l’agrégat, ne s’y colle pas.
Ces résultats n’ont pas pu être rationalisés en termes d’énergie déposée, mais en considérant plutôt la relation entre la durée de collision et la période de vibration des molécules d’eau à la surface des agrégats. Cette période de vibration a pu être extraite quantitativement à partir des probabilités de collage mesurées et coïncide exactement avec la période de vibration mesurée par une technique complètement indépendante. Ceci conforte l’interprétation des scientifiques : lorsque la durée de la collision est inférieure à la période de vibration des molécules d’eau à la surface de l’agrégat, l’énergie de la collision n’a pas le temps d’être transférée à celui-ci et la molécule est diffusée sur l’agrégat, sans coller. Au contraire, lorsque la collision dure suffisamment longtemps, l’énergie de collision a le temps d’être redistribuée entre les modes internes de vibration de l’agrégat et le collage a lieu. Ainsi dans le premier cas, l’agrégat se comporte comme un objet « dur » sur lequel rebondit la molécule, alors que dans le second cas il est « mou », ce qui favorise l’absorption d’énergie et donc le collage.
La chambre de collage Sur cette photographie, les agrégats se propagent de droite à gauche. On aperçoit à droite le dispositif de ralentissement des agrégats, au centre la cellule contenant, sous forme de vapeur, les molécules d’eau qui vont se coller sur ces agrégats, et à gauche le système d’accélération électrostatique qui permet de mesurer la taille, à la molécule près, des agrégats obtenus. L’ensemble du dispositif a été conçu et construit au LCAR.
Référence :
"Sticking properties of water clusters", S. Zamith, P. Feiden, P. Labastie, J-M. L’Hermite, Phys. Rev. Lett., 10 mars 2010.
Contacts :
Chercheur CNRS l Jean-Marc L’Hermite l T 05 61 55 88 18 l j-m.lhermite@irsamc.ups-tlse.fr
Presse CNRS l Laetitia Louis l T 01 44 96 51 37 l laetitia.louis@cnrs-dir.fr
Voir en ligne : Communiqué de presse